Des propositions pour mettre fin à la “bulle” photovoltaïque
Alors que le gouvernement a annoncé mardi une hausse du tarif de rachat de l’énergie photovoltaïque après deux ans de baisse, la fondation Terra Nova dans une note publiée en février 2012, avait estimé qu’il était urgent de définir une vraie politique de relance de la filière pour mettre fin à la « bulle » dans le secteur.
Les auteurs proposaient notamment une refonte de l’ensemble de l’économie des aides, le développement d’une filière industrielle en France, la création d’un outil de soutien au développement des nouvelles technologies de l’énergie, et la consolidation de la filière artisanale et technique du bâtiment.
Nous vous proposons de mettre en lumière les points précis développés par la fondation :
Comment relancer la filière photovoltaïque ?
Mettre fin à la « bulle » du photovoltaïque
Les mesures prises en urgence par le gouvernement ont constitué un début de réponse, parce qu’elles prévoient une baisse immédiate permettant de contrôler les volumes et les coûts. Toutefois la réévaluation du mécanisme est insuffisante.
L’objectif annuel de développement, fixé par le Gouvernement à 500 MW/an est insuffisant pour permettre le développement d’une industrie française. Cet objectif doit être au minimum doublé et évoluer ensuite à la hausse pour accompagner le développement de la filière industrielle.
La prévisibilité du cadre réglementaire est par ailleurs un élément clé de la capacité des acteurs à effectuer des investissements rationnels.
La grille d’ajustement du tarif d’achat chaque trimestre est actuellement trop brutale, puisque les tarifs peuvent baisser de 9,5 % par trimestre (soit plus de 35 %/an) en cas de dépôt de projets supérieurs à la trajectoire souhaitée. Un ajustement aussi brutal, qui pouvait se justifier alors que la massification de la production en Chine abaissait rapidement les coûts de production, n’est plus justifié maintenant que la massification est achevée.
D’autre part, dans un souci de préparer l’arrivée des réseaux intelligents (smart grids), le mécanisme de tarif d’achat pourrait être revu pour favoriser l’autoconsommation et non la revente en totalité de l’électricité produite, comme actuellement.
Une bonification du tarif d’achat lorsque le panneau installé est fabriqué dans l’Union européenne devrait également être étudiée afin de favoriser l’industrie française et européenne. L’Italie accorde depuis 2011 une bonification de 10 %.
En ce qui concerne les appels d’offres, il convient d’afficher un planning de lancement pluriannuel de manière à donner la lisibilité suffisante. Les critères de candidature pourraient par ailleurs être simplifiés autour de critères favorables à l’industrie française (technologies spécifiques, critères CO2, emplois locaux…).
Favoriser le développement d’une filière industrielle en France
Une politique volontariste, favorisant l’innovation et privilégiant la constitution d’une filière industrielle européenne et nationale, consciente des évolutions rapides du secteur et capable de s’adapter à une demande changeante, sera seule à même de faire de la France une pionnière des énergies renouvelables.
Il faut en effet signaler que 80 % des panneaux posés en France proviennent d’usines chinoises qui, outre la question industrielle, posent aussi une question environnementale (les modules, très consommateurs d’énergie, sont produits à partir d’une électricité chinoise issue du charbon, donc fortement carbonée ; il s’agit par ailleurs de pondéreux lourds à transporter). Les mécanismes de soutien à la demande ne peuvent donc pas suffire : une réflexion de fond devrait être lancée pour investir dans une vraie filière industrielle nationale et sur les possibilités juridiques de limiter l’importation de produits asiatiques à bilan carbone négatif dans la filière.
Une politique de l’offre pourrait ainsi être engagée en faveur non seulement du soutien à l’émergence d’une filière française du photovoltaïque, mais aussi plus généralement en faveur du soutien aux nouvelles technologies de l’énergie (renouvelables, stockage, réseaux intelligents…)[*]. Outre le maintien de l’effort de R&D aux niveaux européen et national, cette politique s’appuierait sur la constitution d’un outil de soutien au développement des technologies et du tissu industriel du secteur.
Cet outil pourrait prendre la forme d’un fonds de capital investissement Energies Vertes de l’ordre de 1 Md€ géré par le Fond stratégique d’investissement (FSI) ou une nouvelle Banque publique d’investissement et financé par les ressources de cette institution. Ses interventions s’inscriraient dans une stratégie de constitution de filière industrielle, élaborée par le FSI en concertation avec les parties prenantes.
En parallèle à la constitution de ce fonds, une stratégie de consolidation de la filière artisanale et technique du bâtiment serait mise en place. Elle s’articulerait autour d’une formation renforcée des acteurs et une incitation (fiscale ou via des labels professionnels) au regroupement des activités (plaquiste, chaudiériste, couvreur…) pour constituer de véritables entreprises de rénovation thermique capables de mettre en œuvre des opérations de rénovation globales, coordonnées et cohérentes.
Une réflexion doit par ailleurs être entamée avec les collectivités sur la manière de les associer au développement de projets et à celui de la filière. Plusieurs pistes sont possibles : articuler les aides locales avec l’aide nationale, cibler avec les aides locales certaines technologies très intégrées au bâti ou de niches (trakeurs solaires au sol, concentration solaire…), favoriser la création de sociétés d’économie mixte ou d’autres montages adéquats, mettre en œuvre une politique de développement du territoire (implantation d’industries, déploiement d’ENR sur des zones choisies), viser des retours sur investissements plus faibles, compensés par une garantie de volume.
* On se rapportera pour davantage de détails au rapport « Maîtriser l’énergie : un projet énergétique pour une société responsable et innovante », rapport du groupe de travail Terra nova sur la politique énergétique présidé par Alain Grandjean, juillet 2011, téléchargeable ici : http://www.tnova.fr/essai/ma-triser-l-nergie-un-projet-nerg-tique-pour-une-soci-t-responsable-et-innovante
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