Le CERN apporte la technologie du vide aux panneaux solaires
La compagnie SRB Energy a livré le 9 mars à l’Aéroport international de Genève le premier des panneaux solaires qui formeront l’une des plus grandes centrales solaires de Suisse.
Un peu moins de 300 panneaux solaires thermiques à haute température couvriront une surface de 1.200 mètres carrés sur le toit du terminal principal de l’aéroport de Genève. Ces panneaux, qui chaufferont les bâtiments en hiver et les rafraîchiront en été, sont issus de technologies de vide développées au CERN pour les accélérateurs de particules.
Le panneau solaire à ultravide offre de hauts rendements à haute température.
Sa particularité tient à la qualité du vide qui est crééà l’intérieur du panneau et à la technologie mise au point pour le garantir dans le temps grâce à des pompes getter très efficaces. Les 282 éléments installés sur les toits de Genève Aéroport chaufferont à 130°C un fluide qui alimentera un réseau de chauffage à distance.
Ce chantier s’inscrit dans le cadre de la politique énergétique menée par Genève Aéroport. Outre le souci de sobriété et d’efficience, la plate-forme industrielle entend développer sa part de consommation d’énergies renouvelables.
“Nous sommes enchantés que l’aéroport international de Genève ait choisi cette technologie“, explique Cristoforo Benvenuti, qui a inventé ces panneaux et a travaillé sur les technologies du vide au CERN depuis les années 70, “Ces panneaux sont issus du développement des technologies du vide pour la physique fondamentale et c’est formidable de les retrouver au service des énergies renouvelables.“
“Cette nouvelle génération de panneaux solaires est une technologie verte innovante résultant d’un partenariat entre le CERN et l’industrie“, indique Enrico Chesta, chef du bureau Transfert de technologies au sein du groupe Transfert de connaissances du CERN, “Comme la médecine ou les technologies de l’information, l’énergie devient un domaine dans lequel les technologies des accélérateurs et des détecteurs sont transférées avec succès.”
Les technologies du vide ont été développées pour les besoins des accélérateurs car les faisceaux de particules ne peuvent circuler que dans des tubes dans lequel l’air a été pompé, à défaut de quoi ils seraient très vite stoppés. Un vide poussé est d’autant plus important dans les collisionneurs, ces accélérateurs qui font entrer en collision des particules. Les faisceaux peuvent en effet y circuler plusieurs heures durant, avec seulement quelques particules se percutant à chaque croisement. Le premier collisionneur proton-proton au monde, les Anneaux de stockage à intersections (ISR), qui a démarré en 1971 au CERN, a inauguré les recherches sur l’ultra-vide du laboratoire. A la fin des années 1980, le Grand collisionneur électron-positon (LEP) battait un record de vide grâce à l’utilisation de ruban getter, un matériau qui a la faculté de piéger les molécules résiduelles de gaz, à la manière d’un papier tue-mouches. Mais c’est le mariage entre ce matériau getter et les dépôts de couches minces, initié pour le LHC dans les années 90, qui a ouvert la voie à l’utilisation de cette technologie pour les panneaux solaires.
Grâce à l’ultra-vide, l’isolation de la chambre thermique du panneau solaire est exceptionnelle, les pertes de chaleur sont considérablement réduites et l’efficacité du panneau est nettement améliorée. “Nous avons mesuré des températures de 80°C à l’intérieur du panneau quand celui–ci était couvert de neige“, a expliqué Cristoforo Benvenuti. Ces panneaux récupèrent par ailleurs de manière plus efficace la puissance énergétique délivrée par la lumière diffuse. Ces deux technologies les rendent particulièrement adaptés aux pays peu ensoleillés et froids, où les panneaux solaires thermiques classiques présentent une efficacité réduite.
Cristoforo Benvenuti a proposé la technologie de pompage getter pour le LEP et a breveté au CERN la technologie de dépôt de couche mince de getter. Le CERN a proposé des licences pour les compagnies de ses Etats membres. En 2005, le groupe automobile espagnol Grupo Segura s’est associéà Cristoforo Benvenuti pour former la compagnie SRB Energy. SRB Energy a obtenu une licence pour exploiter la technologie et une usine de production a été construite près de Valence en Espagne. Les activités de recherche et développement sont restées basées au CERN, à Meyrin (Suisse).
“La société essaimée SRB Energy est un exemple de la manière dont les technologies développées pour la recherche fondamentale peuvent doper l’innovation dans les Etats membres“, précise Giovanni Anelli, Chef du groupe Transfert de connaissances du CERN. “Avec une politique renforcée de transfert de connaissances, le CERN s’efforce d’optimiser l’impact positif de la physique des hautes énergies dans la vie de tous les jours.”
SRB Energy s’est adossée à l’industriel du secteur automobile Grupo Segura, de Valencia (Espagne) pour passer du stade artisanal à une production de masse. Le marché conclu avec Genève Aéroport constitue la plus grosse commande que cette entreprise ait eu à honorer depuis sa création en 2005.
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