Lorsqu’elles sont groupées, les éoliennes situées en première ligne projettent une « ombre » de vent sur celles situées derrière elles, un remous, ce qui réduit leurs performances. Or cet effet se dissipe plus rapidement dans des conditions de convection de l’air, disent des chercheurs de l’EPFL dans une récente publication.
C’est une évidence : les parcs éoliens fonctionnent le plus efficacement lorsqu’il y a du vent. Mais mis à part la vitesse du vent et sa direction, d’autres facteurs plus subtils influencent leur production d’électricité.
A l’aide d’un modèle mathématique, des chercheurs du Laboratory for Wind and Renewable Energy (WIRE) de l’EPFL ont montré l’impact des mouvements verticaux de l’air sur la productivité des parcs éoliens. Ils ont découvert que des turbulences accrues, provoquées par les mouvements de convection typiques qui se produisent lors de journées chaudes et ensoleillées, accroissent la productivité des parcs éoliens, en réduisant la durée de vie des remous en aval des turbines individuelles. Ils ont publié leurs résultats ce mois dans le journal Physics of Fluids.
Les auteurs de l’étude, Mahdi Abkar et Fernando Porté-Agel, ont utilisé un modèle mathématique pour étudier la turbulence générée par une éolienne lorsque ses hélices taillent dans le vent qui l’anime. Comme les turbines sont souvent disposées de manière à former des parcs éoliens denses, il est important de comprendre les remous turbulents générés par celles qui sont situées en amont, et combien de temps il faut pour que ces remous s’étalent. On peut alors prédire la production totale d’électricité de ces parcs éoliens, puisque les turbines situées dans l’ombre de vent de celles situées devant elles sont animées par un fort courant. Aujourd’hui, les turbines sont espacée de l’équivalent de cinq à sept diamètres d’hélice – environ 500 à 700 mètres pour les grandes unités – afin de maximiser la quantité d’énergie pouvant être produite en un endroit donné.
Vers une production optimale sur 24 heures
«Nous voulions comprendre l’effet de la stabilité thermique sur les caractéristiques et la dynamique des remous à l’arrière des éoliennes», dit Mahdi Abkar. En d’autres termes, comment les courants verticaux de la basse atmosphère provoqués par la chaleur influencent l’ombre de vent d’une éolienne. Lors de journées ensoleillées, le sol chaud réchauffe l’air et le fait monter. Cet mouvement vertical est caractéristique d’une atmosphère en convection, et donc instable. Lors d’une nuit typique, au contraire, la surface fraîche du sol refroidit l’air situé au-dessus, ce qui produit une situation stable.
A l’aide de simulations, Mahdi Abkar a étudié la production d’électricité d’un parc éolien par conditions de convection, et par conditions stables. Il a trouvé des différences significatives entre les deux situations. «Dans une situation de convection, les turbines situées en aval avaient une production inférieure d’environ 30% par rapport à celles situées dans les premières lignes. Dans une atmosphère stable, les pertes étaient encore plus importantes, de l’ordre de 60%», dit-il. Ses découvertes sont importantes pour optimiser la production de parcs éoliens sur un cycle de 24 heures, puisque la basse atmosphère passe de son état stable la nuit à une situation de convection typique de jour.
Mais pourquoi les remous se calment-ils beaucoup plus rapidement dans des conditions de convection ? Selon le chercheur, cela est principalement dû aux niveaux élevés de turbulence dans le vent, qui ont pour effet d’accroître le brassage de l’air à l’intérieur du parc, ce qui brise le remous à l’aval des turbines. Par contraste, dans une situation calme, le remous n’est pas perturbé et peut durer beaucoup plus longtemps, puisque le brassage reste faible.
L’impact des éoliennes sur la méteo
Décortiquer les données physiques en jeu dans les parcs éoliens ne vise pas seulement à optimiser leur rendement. Les éoliennes modifient la dynamique de l’atmosphère, en absorbant une partie du vent et en accroissant les turbulences, ce qui peut modifier plusieurs autres paramètres, comme l’humidité de l’atmosphère et la température. C’est pourquoi les météorologistes sont intéressés à améliorer la manière dont ils les intègrent dans les modèles météorologiques.
Dans un deuxième article, publié dans le Journal of Renewable and Sustainable Energy, Abkar et Porté-Agel proposent une nouvelle manière de prendre en compte les parcs éoliens dans les modèles atmosphériques à grande échelle, qui intègrent le nombre de turbines du parc, la manière dont elles sont disposées, et la direction du vent.
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