Le soutien de l’Etat français à la production d’électricité générée à partir d’éoliennes terrestres n’enfreint pas les règles de l’Union Européenne en matière d’aides, telle est la conclusion de la Commission européenne.
La France aide le secteur de l’éolien terrestre en imposant des tarifs supérieurs au prix du marché aux distributeurs qui achètent l’électricité produite dans ces installations (tarifs de rachat). Le montant de l’aide annuelle est estiméà 500 millions d’euros.
Les tarifs de rachat permettent aux producteurs d’électricité renouvelable de couvrir les coûts de production additionnels qu’ils supportent par rapport aux producteurs utilisant des méthodes traditionnelles de production d’électricité. L’enquête de la Commission Européenne a montré que les tarifs de rachat compensaient “uniquement ces coûts additionnels et permettent un taux de rendement raisonnable conforme aux lignes directrices de 2008 sur les aides en faveur de l’environnement.”
En validant le tarif d’achat éolien français, la Commission européenne a donc renforcéà court terme le développement du secteur s’est réjouit l’association France Énergie Éolienne (FEE). De nombreux projets en effet sont en attente en l’absence de garantie sur le tarif d’achat.
“La France est en pleine transition énergétique. Pour se développer, la filière éolienne française a besoin de s’appuyer sur un tarif d’achat solide qui puisse rassurer les investisseurs en leur donnant de la visibilité. Et puis en décembre 2015, la France accueille la conférence mondiale sur le climat, la COP 21. L’éolien français y aura toute sa place. Cette décision européenne nous permet de nous engager pleinement dans cette direction” a déclaré Frédéric Lanoë, Président de France Energie Eolienne.
L’imbroglio commence en 2008 quand l’Etat français omet de notifier clairement à Bruxelles le motif et le montant du tarif d’achat éolien français. Saisi sur ce point précis par une association anti-éolienne, le Conseil d’Etat se tourne vers la Cour de justice européenne. En décembre 2013, la Cour conclut sans surprise que le tarif d’achat français est apparentéà une aide d’état illégale puisque non notifié auprès de Bruxelles comme l’exige le règlement communautaire. Le Conseil d’Etat – puisqu’il a été saisi – pourrait assez logiquement se prononcer suite à la Cour de Justice européenne sur l’illégalité de l’arrêté tarifaire (qui régit le mécanisme du tarif d’achat) et l’annuler. La filière se retrouverait alors sans tarif d’achat, ce qui serait catastrophique.
Entre-temps, le gouvernement français a effectué une procédure de notification du tarif en bonne et due forme auprès de la Commission et c’est ce mécanisme-là qui est aujourd’hui validé par Bruxelles. Afin de se prémunir contre l’effet d’une éventuelle annulation du tarif d’achat par le Conseil d’Etat, le gouvernement doit donc rapidement promulguer un nouvel arrêté tarifaire.
L’essentiel pour la filière éolienne française est de ne pas se retrouver sans tarif d’achat.
“Attention, ce n’est pas le tarif d’achat éolien qui était ici remis en cause, mais sa notification auprès de la Commission européenne. La notification à Bruxelles étant faite, on s’engage maintenant sur des procédures nationales. Il faut que le gouvernement agisse sans même attendre la décision du Conseil d’Etat. Pour nous, il importe désormais de renforcer et sécuriser le tarif d’achat actuellement en vigueur – en l’optimisant dans un second temps. Toutes les données, toutes les études montrent que c’est un mécanisme qui permet de produire une électricitéà bas coût, et de faire émerger une filière industrielle qui a déjà généré 11 000 emplois. Intéressant, en temps de crise” a analysé Frédéric Lanoë.
D’autres pays européens se trouvent dans la même situation et devront sans doute la régulariser pour ne pas impacter leurs filières éoliennes.
La décision de la Commission européenne est un signal encourageant pour la filière éolienne française qui redémarre (2.000 MW de contrats éoliens ont été signés en un an pour des parcs qui commenceront à produire entre 2014 et 2015).
Pour autant le contexte général est incertain. Dans quelques jours, Bruxelles doit rendre ses grandes orientations en matière de mécanismes de soutien aux énergies renouvelables. La Commission préconise une suppression progressive du tarif d’achat pour les EnR les plus matures, dont l’éolien.
La “CSPE” sous surveillance
En parallèle, la Commission européenne a ouvert une enquête approfondie afin d’examiner si 3 types de réductions sur les surtaxes sur les énergies renouvelables (la ‘CSPE’ ou contribution au service public de l’électricité), accordées en France aux grands consommateurs d’énergie, étaient conformes aux règles de l’UE en matière d’aides d’État. L’ouverture d’une enquête approfondie a permis aux tiers intéressés de présenter leurs observations sur les mesures soumises à examen.
Pour financer le soutien aux parcs éoliens à terre, chaque consommateur d’électricité en France doit acquitter une redevance uniforme par kWh consommé– la contribution au service public de l’électricité (CSPE). Cependant, la loi prévoit trois exceptions :
la CSPE n’est pas due sur la consommation individuelle inférieure à 240 GWh par an ;
la CSPE n’est pas due lorsque le montant annuel par site de consommation excède 550.000 euros (indexé) ;
pour les sociétés industrielles qui consomment au moins 7 GWh par an, la CSPE est plafonnée à 0,5 % de leur valeur ajoutée annuelle.
Ces trois réductions semblent donner aux grands consommateurs d’électricité un avantage sélectif qui pourrait fausser la concurrence au sein du marché unique. La possibilité d’octroyer de telles réductions n’est pas prévue dans les lignes directrices de 2008, actuellement en vigueur, sur les aides en faveur de l’environnement. La Commission européenne a donc des doutes sur la compatibilité de ces aides avec les règles de l’UE en matière d’aides d’État. Parallèlement, elle est en train de réviser ses lignes directrices et envisage actuellement d’y inclure des dispositions permettant l’octroi de réductions pour les grands utilisateurs d’énergie, sous certaines conditions, afin de préserver la compétitivité.
L’enquête approfondie permettra aux tiers intéressés de fournir à la Commission des informations susceptibles d’aider à mieux comprendre les effets de la surtaxe quant au risque de délocalisation des activités ainsi que l’impact des réductions de cette surtaxe sur la concurrence dans le marché unique.
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